LES DÉSARROIS D’UN CONSULTANT EN MANAGEMENT, NORBERT ALTER, PROFESSEUR DES UNIVERSITÉS

Norbert Alter est sociologue, professeur des universités. Il a exercé au CNAM, à Paris Dauphine et à l’IEP de Paris. Ses recherches et publications concernent le monde du travail et les trajectoires de vie atypiques. Il est l’auteur d’une quinzaine d’ouvrages dont L’innovation ordinaire et Sans classe ni place
Contexte et critique du nouveau management public
Nouveau management public (NMP) :
Ce mode de gestion s’inspire des techniques managériales du secteur privé en mettant l’accent sur la performance, la rationalisation et la mesure d’objectifs quantifiables. D’après Norbert Alter dans Pour en finir avec le machin, cette approche a généré plusieurs effets pervers :
Standardisation et déshumanisation :
L’uniformisation des pratiques et l’obsession des indicateurs transforment des missions de service public en simples opérations de production, au détriment de l’expertise et de l’autonomie des agents.
Fragmentation des organisations :
La dispersion des responsabilités et la multiplication des procédures conduisent à une perte de sens et de cohérence dans l’action publique, affaiblissant la capacité des institutions à répondre aux besoins des usagers.
Aliénation et dévalorisation des professionnels :
La focalisation sur la performance quantitative entraîne une baisse de la reconnaissance des compétences et de l’engagement des agents, qui se retrouvent soumis à des pressions managériales déshumanisantes.
Priorisation du court terme :
L’accent mis sur des résultats immédiats compromet la réflexion stratégique et l’innovation, essentielles à la qualité et à la durabilité du service public.
Les revendications du SNCI-FO
Face aux effets délétères du nouveau management public, le SNCI-FO revendique une revalorisation des services publics basée sur une gestion repensée et davantage centrée sur l’humain et la qualité du service public. Parmi nos principales revendications figurent :
- Reconnaissance de l’expertise et de l’autonomie professionnelle :
Les agents demandent une réelle valorisation de leur savoir-faire et de leur jugement, loin d’une logique exclusivement chiffrée. - Amélioration des conditions de travail :
Une réduction de la pression liée aux indicateurs, accompagnée d’un allégement des charges administratives, afin de redonner du temps aux missions réellement essentielles. - Renforcement du dialogue social :
Instaurer des mécanismes de concertation plus solides avec les instances représentatives qui tiennent compte des réalités du terrain et des spécificités des missions de service public. - Retour aux valeurs du service public :
Plutôt que d’adopter une logique de performance purement quantitative, le SNCI-FO appelle à un recentrage sur la qualité du service rendu aux usagers et sur l’éthique publique.
Enjeux et perspectives
Synthèse des deux approches :
La critique de Norbert Alter et les revendications du SNCI-FO convergent vers une même nécessité : repenser la gestion de la chose publique en rejetant une approche managériale déshumanisante et en réaffirmant des valeurs de service, de solidarité et de professionnalisme. Cela suppose de :
- Redéfinir les indicateurs de performance pour qu’ils intègrent des dimensions qualitatives et humaines.
- Restaurer l’autonomie et la responsabilité des agents, essentiels à une véritable mission de service public.
- Favoriser un dialogue social constructif pour adapter en continu les pratiques aux réalités du terrain.
Perspective :
Cette réorientation viserait à transformer le modèle actuel en un système où la gestion publique ne se réduit pas à une logique de rentabilité mais place l’humain et la qualité du service au cœur des priorités. Une telle démarche nécessite des réformes structurelles, une remise en cause des dogmes managériaux et un engagement fort des acteurs publics et syndicaux.