NMP ET ÉPUISEMENT PROFESSIONNEL, UNE ÉTUDE ÉCLAIRANTE

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“LE NOUVEAU MANAGEMENT PUBLIC EST-IL PATHOGÈNE ? ABORD DE CHATILLON, PROFESSEUR DES UNIVERSITÉS ET DESMARAIS, MCF

Le Nou­veau Mana­ge­ment Public s’est répan­du sous de diverses formes, dans le monde entier depuis les années 80. Durant la même période, les orga­ni­sa­tions publiques, au même titre que les entre­prises, ont connu une mon­tée des patho­lo­gies liées au tra­vail (stress, har­cè­le­ment, épui­se­ment

pro­fes­sion­nel) en lien avec les trans­for­ma­tions orga­ni­sa­tion­nelles liées au NMP. Si les dis­cours sur l’impact délé­tère du NMP sont rela­ti­ve­ment répan­dus, il n’existe pas de recherche ayant ten­té de mesu­rer le lien entre les chan­ge­ments liés au NMP et l’épuisement pro­fes­sion­nel. Les cher­cheurs Emma­nuel Abord de Cha­tillon and Céline Des­ma­rais exa­minent l’impact de ces évo­lu­tions sur l’épuisement pro­fes­sion­nel, dans le cadre théo­rique des exi­gences-res­sources au tra­vail.

Ce cadre pos­tule que la souf­france au tra­vail et les risques psy­cho­so­ciaux résultent d’une double contrainte d’une part l’accroissement des exi­gences impo­sées aux agents (par exemple charge de tra­vail, la pres­sion tem­po­relle, l’isolement, la pres­sion orga­ni­sa­tion­nelle, les demandes émo­tion­nelles) et d’autre part la perte de res­sources dont ces der­niers dis­posent pour s’engager et agir (par exemple le contrôle sur leur tra­vail, la sécu­ri­té de l’emploi, le sou­tien social).

Le NMP pro­duit de nou­velles exi­gences…

Les chan­ge­ments liés au NMP pro­duisent une inten­si­fi­ca­tion du tra­vail :

L’injonction de « faire plus ou mieux avec moins », cen­trale dans les chan­ge­ments liés au NMP, exprime clai­re­ment l’idée d’intensification du tra­vail. Il s’agit en effet de faire davan­tage avec des res­sources (notam­ment humaines) moindres. Ain­si, un cer­tain nombre de tra­vaux font expli­ci­te­ment le lien entre le NMP et l’extension de la charge de tra­vail, en lien avec une pres­sion accrue et une exten­sion des pro­cé­dures.

De nom­breux agents et cadres consacrent un temps de plus en plus impor­tant aux tâches admi­nis­tra­tives et notam­ment à ren­sei­gner les sys­tèmes d’information et de ges­tion. Le NMP conduit à une for­ma­li­sa­tion et une bureau­cra­ti­sa­tion de plus en plus forte (le fonc­tion­na­lisme) qui aug­mente la charge de tra­vail.

Les chan­ge­ments liés au NMP affectent les col­lec­tifs de tra­vail, les rela­tions inter­per­son­nelles et les rela­tions avec les usa­gers.

Cette atteinte aux col­lec­tifs de tra­vail passe à la fois par une dégra­da­tion des rela­tions sociales, et par l’émergence de cli­mats de tra­vail délé­tères.

Les mesures liées au NMP conduisent à un cli­mat de com­pé­ti­tion qui affecte les rela­tions sociales, une dégra­da­tion de la satis­fac­tion au tra­vail et un déclin de la col­lé­gia­li­té.

Les rela­tions avec les usa­gers sont éga­le­ment impac­tées. Le cli­mat de vio­lence psy­cho­lo­gique est envi­sa­gé comme une contrainte qui affecte de manière accrue les per­son­nels des ser­vices publics. Si dans l’esprit de beau­coup, ces vio­lences sont asso­ciées à un phé­no­mène social de mon­tée des inci­vi­li­tés, un cer­tain nombre d’analyses font cepen­dant état d’un lien fort entre la moder­ni­sa­tion des ser­vices publics et ces nou­velles formes de vio­lence.

…qui engendrent une hausse de l’épuisement pro­fes­sion­nel !

En effet, la charge de tra­vail est l’un des anté­cé­dents les plus com­mu­né­ment asso­ciés à l’épuisement pro­fes­sion­nel et au stress. Un grand nombre de tra­vaux asso­cient la sur­charge de tra­vail à l’épuisement pro­fes­sion­nel et notam­ment à la dimen­sion de l’épuisement émo­tion­nel.

Il est ain­si mon­tré qu’en moyenne, la sur­charge de tra­vail asso­ciée à la pres­sion tem­po­relle explique signi­fi­ca­ti­ve­ment l’épuisement émo­tion­nel.

Le cli­mat de vio­lence psy­cho­lo­gique a pour carac­té­ris­tique de pro­duire des stres­seurs conti­nus qui ont des effets addi­tion­nels. La rela­tion entre le cli­mat de vio­lence psy­cho­lo­gique pro­vo­qué par les réor­ga­ni­sa­tions liées au NMP et la mau­vaise san­té men­tale des employés ain­si éta­blie confirme les constats d’épuisement pro­fes­sion­nel.

Le SNCI-FO exige l’a­ban­don des mesures rele­vant du nou­veau mana­ge­ment public et reven­dique le retour au pari­ta­risme et à la recon­nais­sance de l’expertise des per­son­nels d’inspection au ser­vice de l’École publique.